Slut Shaming : les Cocues Awards ont encore frappé

Certains disent que j’ai un problème avec les hommes. Que j’écris pour me venger et passer des frustrations, que je n’ai pas beaucoup de considération pour eux. C’est sans doute vrai.

Cela dit, j’ai un plus grand problème encore avec les femmes. En gros, je n’aime personne, voilà. Les hommes sont lâches, les femmes sont stupides, c’est malheureusement la conclusion à laquelle je suis parvenue bien trop souvent. Bien sûr, ce n’est pas le cas de tout le monde et heureusement. Bien sûr, les rôles sont parfois inversés. Il y a des femmes manipulatrices et des hommes suffisamment idiots pour les croire. Là où les hommes sont moins stupides, c’est qu’ils crachent rarement sur leurs propres intérêts.

Les femmes, elles, participent à leur propre stigmatisation (ce que je fais aussi en écrivant qu’elles sont stupides, je sais). J’ai rencontré un type il y a quelques temps qui me disait que la société attendait plus des femmes que des hommes et qu’on devrait le prendre comme un compliment. Peut-être. Mais moi, je suis fatiguée de devoir être toujours toute blanche et innocente, de ne pas commettre de fautes et d’erreurs humaines, de petits moments d’égarements égoïstes, rien qu’une fois ou deux, sous prétexte que je suis une femme et qu’une femme doit bien se comporter. Bah je vous emmerde.

Moi qui croyais être un précurseur en parlant de culpabilisation des femmes qui aiment le sexe, je suis à la masse, y a même déjà des slut walks pour protester contre ce phénomène. Je fais ma pancarte et j'arrive !

Moi qui croyais être un précurseur en parlant de culpabilisation des femmes qui aiment le sexe, je suis à la masse, y a même déjà des slut walks pour protester contre ce phénomène. Je fais ma pancarte et j’arrive !

Je sais que je reviens souvent sur le sujet des briseuses de ménage, mais je viens juste de découvrir un fabuleux site américain : shesahomewrecker.com (pour mes amis non anglophones : cestunebriseusedemenage.com).

Le concept : une bande de pintades cocues et stupides se vengent en postant sur un site des photos et des informations sur la maîtresse de leur compagnon, jusqu’à leur nom, facebook et adresse, accompagné d’un petit texte fort charmant. Les autres pintades cocues et stupides, ou tout simplement les frustrées de la vie qui regardent trop Real Housewives et qui n’ont rien d’autre à foutre, commentent allègrement ces photos et peuvent aller insulter et menacer la briseuse de ménage par facebook ou directement à son domicile. God bless America.

Sur ce site, les femmes endossent toute la responsabilité d’avoir brisé un couple (qui en fait ne va pas si mal parce que quand on lit le petit texte, elles reprennent souvent le mari fautif et tout va de nouveau merveilleusement bien entre eux). Les hommes, eux, passent juste pour des victimes, des êtres un tout petit peu abrutis qui ont commis un petit écart de conduite – « mais après tout, ce n’est qu’un homme », nous dit Kelly, 34 ans – et qui se sont laissés influencer par une diabolique tentatrice. Parfois on pense même qu’ils ont été drogués.

La diabolisation de la femme libérée (ou tout simplement, qui a eu le malheur d’ouvrir les cuisses ou son coeur à la mauvaise personne) : un concept que nos amis d’Outre-Atlantique appellent le « Slut-Shaming », qu’il soit explicite ou inconscient. Et ce sont les femmes qui la pratiquent le plus.

L’Université de Corneli a invité des étudiantes à lire le portrait d’une dénommée Joan et à donner leurs impressions sur elle. Dans le premier groupe interrogé, Joan était une femme n’ayant connu que deux partenaires. Pour le deuxième groupe, elle en avait eu une vingtaine. L’étude a montré que les femmes portaient un regard très dur sur la Joan aux multiples amants, même les femmes elles-mêmes libérées sexuellement. Elles la considèrent moins compétente et moins stable que la Joan aux deux partenaires.

Le même test a été effectué sur des étudiants avec le portrait d’un dénommé Jim. Là, pas de surprise : le Jim aux deux conquêtes était un quasi-puceau sans expérience tandis que le Jim-Casanova était un homme sûr de lui et compétent, plus sympathique quoiqu’un peu menaçant. Vis à vis des femmes, les hommes vont aussi pratiquer le Slut-Shaming, mais différemment : une fille libérée est toujours assez bien vue quand on pense pouvoir la sauter. Une fois que c’est fait ou qu’il s’avère qu’elle n’est pas intéressé, c’est une belle salope.

Je veux bien croire que même les femmes sexuellement libérées ont condamné la Joan aux 20 partenaires. Même moi qui tiens un blog sur le sujet il m’arrive de pratiquer plus ou moins inconsciemment du slut-shaming (qui maintenant que j’y pense, est une traduction quand même beaucoup plus courte de « la culpabilisation des femmes qui aiment le sexe »). En effet, qui n’a jamais dit d’une autre fille avec mépris que « toute la ville lui est passée dessus sauf le tramway » .

Internet, ce monde merveilleux où l'humanité dévoile ses plus beaux aspects

Internet, ce monde merveilleux où l’humanité dévoile ses plus beaux aspects

Il m’est arrivé d’envisager de coucher avec un homme et d’être gênée à l’idée qu’il ne s’ajoute à une « liste » de partenaires. Parce que quelque part, même si je revendique mon droit à coucher avec qui je veux, ce « peu » subjectif de partenaires à mon « tableau de chasse », c’est ma seule défense face à ceux qui me traitent de salope plus ou moins ouvertement ou qui pensent que parce que j’ai une facilité à parler de sexe, c’est forcément open bar pour tout le monde.

Comment j’en suis arrivée à vous parler de Slut-Shaming à minuit passé alors que j’avais prévu de me coucher depuis un moment ? Encore grâce aux magnifiques recherches Google qui ont mené à mon blog. La dernière en date : « insultes pour briseuse de couple ». A cette chère anonyme de la toile : ne cherche plus, les Cocues Awards sauront t’aider à trouver ton bonheur parmi les « poupoufs » et autres « putaines ». Pense à insulter ton homme au passage, ça fera du bien à l’humanité.

Je conclurai en disant que si on arrêtait de se traiter mutuellement de putes et de salopes (pour ma part j’ai précisé que je préférais gourgandine), certains hommes considéreraient peut-être un peu moins qu’on l’est parce qu’on a couché avec eux. Merci.